Loi NOME: Nouvelle organisation des marchés de l'électricité
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La loi NOME est une étape importante dans l’ouverture du marché de l’électricité français à la concurrence, dans l’intérêt des consommateurs. Intervenue trois ans après la pleine entrée en vigueur de la nouvelle législation permettant à tout particulier de choisir librement son fournisseur d’électricité, la loi NOME (ou Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité) a apporté une réponse utile aux imperfections constatées jusque-là, reprenant en grande partie les conclusions du rapport de la Commission Champsaur. La loi NOME a été adoptée par le Parlement, après approbation des sénateurs et des députés, en novembre 2010. Promulguée le 7 décembre 2010, elle est entrée en application le 1ᵉʳ juillet 2011.
En particulier, elle institue un dispositif permettant aux fournisseurs alternatifs (c’est-à-dire aux concurrents d’EDF) de bénéficier d’une partie de la rente nucléaire de l’ancien monopole public et de proposer ainsi des tarifs compétitifs aux consommateurs français. Ce dispositif original, l’Accès régulé à l’énergie nucléaire historique (ARENH) a été mis en place en contrepartie de l’extension, à ces fournisseurs, de certaines des obligations de service public imposées à EDF. En mettant sur un pied d’égalité EDF et ses divers concurrents, la loi NOME pose les bases de l’émergence d’un marché libre et concurrentiel.
Le contexte : une nouvelle organisation pour répondre à des exigences européennes
L’État français a fait l’objet de deux procédures d’infraction de la part de la Commission européenne à la fin des années 2000. La première portait sur une transposition incomplète de la directive européenne relative à la concurrence concernant les consommateurs résidentiels. La seconde portait sur le fait que les tarifs vert et jaune, ainsi que le Tartam, étaient assimilés à des aides d’État contraires au droit communautaire.
Ces procédures engagées contre la France ont conduit le gouvernement à former une commission d’experts, présidée par Paul Champsaur, afin de formuler des propositions d’organisation du marché de l’électricité «conciliant la protection des consommateurs, le développement de la concurrence et le financement des investissements».
Deux lois ont suivi la publication du rapport Champsaur : la loi du 7 juin 2010 et la loi du 7 décembre 2010, dite loi NOME.
La loi NOME : deux changements majeurs
La loi NOME a conduit à deux évolutions parallèles :
- D’une part, la loi NOME a rendu le marché plus concurrentiel, dans un sens favorable aux fournisseurs alternatifs :
- Un accès régulé à l’énergie nucléaire historique a été instauré: ce dispositif permet aux fournisseurs alternatifs de bénéficier d’une part de la rente du parc nucléaire historique afin de proposer à leurs clients des tarifs aussi compétitifs qu’EDF ;
- La loi NOME a prévu la suppression des tarifs réglementés de vente pour les professionnels ayant des consommations moyennes et importantes d’électricité (tarifs jaunes et verts); cette suppression aura lieu le 1ᵉʳ janvier 2016 ;
- D’autre part, la loi NOME a préservé le caractère très réglementé du marché de l’électricité :
- La loi NOME a instauré des obligations supplémentaires pesant sur les fournisseurs alternatifs ;
- La loi NOME a garanti le maintien des tarifs réglementés pour les petits consommateurs (tarif bleu).
Enfin, la loi NOME s’inscrit dans le sillage de la loi du 7 juin 2010, qui permet aux particuliers ayant quitté les tarifs réglementés de l’électricité d’y revenir à tout moment (un principe dit de « réversibilité » a alors été instauré).
L'Accès régulé à l'énergie nucléaire historique (ARENH)
La France dispose d'un des plus grands parcs nucléaire au monde.
L’ARENH impose à EDF, l’ancien monopole public devenu depuis une société anonyme, de vendre jusqu’à un quart de la quantité d’électricité qu’il produit à l’aide de ses centrales nucléaires existantes (les futures centrales ne sont pas concernées) aux concurrents d’EDF (Engie, TotalEnergies…), à un tarif unique fixé par l’État. Ce tarif prédéfini, dit “tarif ARENH” fut initialement fixé à 40 €/MWh, avant d’atteindre en janvier 2012 42 €/MWh. À titre de comparaison, le tarif de cession, auquel EDF vend l’électricité aux entreprises locales de distribution (ELD) se situe aux alentours de 32 €/MWh).
Depuis la publication des textes réglementaires, les premières livraisons d’électricité par EDF aux fournisseurs alternatifs dans le cadre de l’ARENH ont eu lieu le 1ᵉʳ juillet 2011.
La loi NOME oblige donc EDF, le fournisseur historique, à céder l’électricité produite à partir du parc nucléaire historique à ses concurrents. La loi NOME fixe ces conditions pour une période transitoire allant du 1ᵉʳ juillet 2011 au 21 décembre 2025. La loi NOME fixe le volume maximal qu'EDF pourrait être amené à céder à ses concurrents à 100 TWh par an – soit environ le quart de la production nucléaire historique française. Le volume réel est fixé par arrêté des ministres en charge de l'Économie et de l'Energie sur avis de la Commission de Régulation de l'Energie. Les fournisseurs d'électricité alternatifs bénéficient ainsi d'un "droit d'accès régulé à l'électricité de base pour [une] période transitoire".
La fixation du prix de l’ARENH
La fixation du prix de l'ARENH cristallise de forts enjeux à la fois pour le fournisseur historique EDF et pour les fournisseurs alternatifs. Il s’agit d'un côté d’aboutir à des tarifs suffisamment bas pour permettre à des fournisseurs alternatifs de proposer des offres à des prix compétitifs, et donc de générer des profits qui doivent permettre à ces fournisseurs d’investir dans des moyens de production d’ici à l’extinction du dispositif de l’ARENH en 2025. De l'autre côté, elle doit assurer au fournisseur historique les revenus nécessaires à la gestion, à la maintenance et à l'allongement de la durée d'exploitation du parc nucléaire historique. À ces frais s'ajoutent ceux liés au programme de renforcement de la sécurité et de la robustesse des centrales qui se déroulera à partir de 2015. Enfin, EDF doit provisionner les ressources nécessaires au démantèlement, à long terme, de ses centrales et afin d’assurer la gestion des déchets nucléaires.
- Pour la fixation de l’ARENH, quatre composantes sont donc additionnées :
- la rémunération des capitaux,
- les coûts d’exploitation des centrales,
- les coûts des investissements nécessaires afin d’étendre la durée d’exploitation des centrales,
- les provisions pour prévoir le démantèlement futur des centrales nucléaires et la gestion à long terme des déchets radioactifs.
Le niveau controversé de l’ARENH
Sur la période 2011-2025, le prix de l’ARENH doit refléter de manière réaliste les coûts complets du parc nucléaire historique. Jusqu’au 1ᵉʳ juillet 2011, le prix de l’ARENH (c’est-à-dire le prix de gros de l’électricité achetée par le biais de ce dispositif par les fournisseurs) a été fixé à 40 €/MWh, dans la continuité du TarTAM. Après le 1ᵉʳ janvier 2012, l’ARENH a été fixé à 42 €/MWh. Ce niveau de prix a été jugé "prudent" par le gouvernement, et reflète selon EDF l’augmentation de ses charges dans le contexte de l’accident nucléaire de Fukushima. Les fournisseurs alternatifs et la Cour des Comptes ont toutefois jugé ce tarif trop élevé et ne reflétant pas les conditions économiques de la production d’électricité par EDF. Dès lors, les fournisseurs alternatifs se sont estimés lésés puisque les coûts que ces fournisseurs doivent supporter sont, selon eux, supérieurs aux coûts supportés par l’ancien monopole.
Les critères de répartition des volumes d'électricité cédés par EDF
À compter du 1ᵉʳ juillet 2011, et pour une durée de 15 ans, les fournisseurs alternatifs d’électricité ont droit à l’ARENH pour un volume total ne pouvant dépasser 100 TWh, soit environ 25 % de la production du parc nucléaire historique.
En cas d’atteinte de ce plafond, celui-ci est réparti par la CRE entre les fournisseurs de manière à permettre le développement de la concurrence sur l’ensemble des segments du marché de détail. La méthode de répartition est définie par décision de la CRE. À défaut, cette répartition est effectuée au prorata des volumes d’ARENH demandés par les fournisseurs.
Le volume de livraison prévu sur la période courant entre le 1ᵉʳ janvier et le 31 décembre 2012 s'élevait déjà à 60,7 TWh. À terme, les 100 TWh ne sont donc pas totalement hors d’atteinte.
La loi NOME et les tarifs réglementés de l’électricité
EDF et certaines ELD sont les seuls à distribuer les tarifs réglementés de l'électricité.
La loi NOME programme la disparition des tarifs réglementés jaunes et verts, qui sont les tarifs fixés par les pouvoirs publics concernant les moyens et gros consommateurs d’énergie. En revanche, les tarifs bleus sont conservés. La loi NOME propose d’ailleurs un cadre pour l’évolution des tarifs bleus (compteurs de moins de 36 kVA) : ils évolueront en tenant compte « de l’addition des coûts d’acheminement d’électricité, du prix d’accès à la base régulée, du prix du complément de fourniture évalué sur la base des prix observés sur les marchés et des coûts de commercialisation ».
Un équilibre entre libre fixation des prix et régulation des prix par l’État
L’un des piliers de la loi NOME vise à favoriser l’émergence d’une diversité d’offres pour les professionnels tout en garantissant pour les particuliers et les petits professionnels le maintien de tarifs réglementés par l’État.
La loi NOME prévoit, en effet, l’extinction des tarifs “jaune” et “vert”. Ces tarifs réglementés sont les tarifs qu’EDF et les entreprises locales de distribution proposent aux consommateurs ayant souscrit une puissance supérieure à 36 kVA (voir tableau ci-dessous). À partir du 1ᵉʳ janvier 2016, ces tarifs fixés par la puissance publique disparaîtront. Les moyens et gros professionnels devront donc obligatoirement souscrire une offre dite de marché auprès d’EDF ou de l’un de ses concurrents comme Direct Energie, EON ou Enel.
En contrepartie de cette évolution, la loi NOME garantit le maintien des tarifs réglementés bleus pour les particuliers et les petits professionnels. En complément, des tarifs sociaux ouverts aux particuliers les plus modestes rendent l’électricité accessible à tous. Ces tarifs sociaux, accessibles aux consommateurs en situation de précarité, sont, pour l’électricité, le tarif de première nécessité (TPN) et pour le gaz naturel, le tarif spécial de solidarité (TSS).
La loi NOME établit donc un équilibre entre fixation libre des prix par les fournisseurs et maintien de tarifs réglementés fixés par l’État. Sur le segment de clientèle des entreprises, le marché a vocation à évoluer plus rapidement vers la dérégulation que celui des particuliers.
Tarif bleu | Tarif jaune | Tarif vert | |
---|---|---|---|
Puissance souscrite | < 36 kVA | 36 kVA < Ps < 250 kVA | > 250 kVA |
Cible | Particuliers et petits professionnels | Professionnels | Entreprises |
Mesure de la loi NOME | Tarif maintenu | Tarif supprimé au 31 décembre 2015 | Tarif supprimé au 31 décembre 2015 |
NB : La puissance souscrite indique la quantité d’électricité qu’un consommateur peut, à un moment donné, soutirer du réseau électrique (c’est-à-dire consommer). Elle dépend du compteur qui est réglé sur une puissance donnée. Lorsqu’un changement de puissance est nécessaire, une intervention technique est nécessaire.
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L’obligation de capacité
La loi NOME a, de plus, instauré une obligation de capacité. Cette obligation de capacité vise à étendre aux fournisseurs alternatifs certaines obligations que ne supportait jusqu’alors qu’EDF.
En situation de pointe, il peut, en effet, être difficile d'assurer la satisfaction de la demande en électricité. Dans une telle situation, il devient alors nécessaire, soit de mettre en service des installations de production d'électricité supplémentaires (qui sont très coûteuses), soit de demander à certains consommateurs de reporter leur consommation (cette dernière possibilité porte le nom “d’effacement”). Le dispositif de l’ARENH aurait donc pu conduire à une distorsion de concurrence en la défaveur d’EDF, puisque EDF aurait été amené à vendre de l’électricité à des fournisseurs qui lui aurait coûté, en période de pointe, beaucoup plus cher, EDF étant obligé de supporter, seule, l’approvisionnement en électricité à partir de centrales coûteuses tandis que ses concurrents auraient pu bénéficier de l’électricité nucléaire à un prix régulé. La loi NOME a donc étendu aux fournisseurs alternatifs l’obligation de couvrir les consommations de pointe de leurs clients par des moyens spécifiques.
Concrètement, la loi NOME impose aux fournisseurs alternatifs d'être en mesure, d'ici à 2015, de justifier qu'ils sont capables d'assurer la consommation de leurs clients en période de pointe.
Pour ce faire, les fournisseurs alternatifs doivent :
- soit, disposer de capacités de production de pointe en propre (par exemple, des centrales à cycle combiné de gaz naturel) ;
- soit, disposer de capacité virtuelles de pointe : le fournisseur conclut en fait un contrat de réservation de puissance auprès d'un producteur ;
- soit, de prouver qu'il peut activer, le cas échéant, des capacités d'effacement (c’est-à-dire qu’il peut réduire sa demande d’électricité en période de pointe) en contractant auprès de différents consommateurs des contrats d'effacement.
Autres dispositions de la loi NOME
Loi NOME et branchement des producteurs
Le sénateur Poniatowski, très impliqué dans la loi NOME, a fait adopter un amendement issu du rapport Charpin mettant les frais de branchement des nouveaux producteurs d'électricité (propriétaires de panneaux solaires, d'éoliennes...) à leur charge, et non plus à ceux d'ENEDIS ou de RTE. C'est un coup financier sévère porté à la filière renouvelable.
La loi NOME réforme la Commission de Régulation de l’Energie
Enfin, la loi NOME prévoit une réforme de l’organisation de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), qui ne compte plus que cinq membres (un président et quatre commissaires) au lieu de neuf avant la loi. Les compétences de la CRE sont par ailleurs élargies. La loi NOME définit les modalités de nomination des commissaires : nomination par décret du président et de deux commissaires, nomination d’un quatrième commissaire par le président de l’Assemblée nationale, et nomination d’un cinquième commissaire par le président du Sénat. Les mandats des membres de la CRE ne sont pas renouvelables. Leur durée est de 6 années pour les commissaires nommés par le Président de la République et pour le Président de la CRE et de 4 années pour les deux autres commissaires.
Les compétences de la CRE seront sont de fait élargies par la loi NOME. Elle se voit conférer un rôle d’arbitre et de gendarme du partage de la rente nucléaire, fixant les prix et réglant les litiges entre fournisseurs. La CRE et l’Autorité de la Concurrence doivent également produire des rapports sur le dispositif de cession d’électricité en base par EDF à ses concurrents. La loi NOME propose que le gouvernement rédige un rapport d’évaluation au 31 décembre 2015 au plus tard, puis tous les cinq ans par la suite, en utilisant comme base de travail les rapports de la CRE et de l’Autorité de la Concurrence.
Historique de la loi NOME
Une évolution européenne
La loi NOME s’inscrit dans l’édification d’un marché européen de l’énergie. Les flux d’électricité et de gaz doivent à terme circuler de façon libre dans le cadre du marché commun de l’Union européenne. La Commission, son organe exécutif, estime que le marché intérieur de l’énergie doit stimuler la concurrence et générer pour les citoyens des économies de 13 milliards d’euros.
Une commission ad hoc : la commission Champsaur
Pour répondre aux objectifs de mise en concurrence des marchés de l’énergie, la Commission Champsaur a rendu un rapport dont les conclusions ont conduit à la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l’électricité. Cette loi met en place plusieurs dispositifs, dont l’Accès régulé à l’énergie nucléaire historique.
Aboutissement logique du Rapport Champsaur, la loi NOME devait initialement entrer en vigueur le 1ᵉʳ juillet 2010, trois ans après l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité et du gaz s’agissant des particuliers. Néanmoins, son examen prévu à l’Assemblée pour l’automne 2009 a été repoussé au printemps 2010, puis à la rentrée et enfin à l'hiver 2010. L'objectif était probablement de mettre la loi NOME à l'ordre du jour de l'agenda médiatique après les élections régionales, étant donné la sensibilité du dossier. Le retard dans l’examen de la loi NOME était à l’époque justifié par un député UMP par la volonté de prendre le «temps de la concertation avec les professionnels». En définitive, les discussions préalables à l’adoption de la loi NOME ont été difficiles. Les amendements proposés ont, par exemple, été particulièrement nombreux (180 en première lecture et 90 en deuxième lecture) et 7 mois se sont écoulés entre le dépôt du projet de loi et son adoption. En effet, le projet de loi, déposé le 14 avril 2010 sur le bureau de l’Assemblée nationale, a finalement été adopté, en deuxième lecture, le 24 novembre 2010, avant d’être promulgué le 7 décembre.
Les enjeux de la loi NOME
Loi NOME et le partage de la rente nucléaire
Les centrales nucléaires d'EDF ont été construites sur fonds publics il y a plusieurs dizaines d'années. Si le nucléaire souffre de coûts d'investissement très élevés, le coût d'exploitation des centrales, lui, est particulièrement bon marché, notamment en comparaison des centrales fonctionnant à partir de sources fossiles. L'exploitation de centrales amorties depuis longtemps génère donc des marges importantes : on parle de "rente nucléaire". EDF et ses clients sont aujourd'hui les principaux bénéficiaires de la rente nucléaire: l'énergéticien dégage des marges satisfaisantes et les clients d'EDF bénéficient de tarifs réglementés de l'électricité bon marché, au regard des prix de l’électricité pratiqués ailleurs en Europe. Avec la loi NOME, l'ensemble des fournisseurs d'électricité et l'ensemble des consommateurs peuvent bénéficier de la rente nucléaire. Cela permet aux fournisseurs alternatifs de proposer, eux aussi, des tarifs compétitifs à leurs clients et de dégager des profits afin de préparer l’après-loi-NOME (lorsque ces fournisseurs ne pourront s’approvisionner qu’au moyen de sources propres ou sur les marchés).
La redistribution des cartes opérée par la loi NOME
La loi NOME était susceptible de bouleverser durablement la structure des marchés de l'électricité en France. Son adoption aurait, en effet, pu se traduire par un recul des parts de marché d'EDF au profit des fournisseurs d'électricité alternatifs. En effet, la loi NOME a conduit EDF à partager la rente nucléaire avec ses concurrents, qui sont alors assurés de bénéficier d'un approvisionnement en énergie à prix maîtrisés jusqu’en 2025.
La résistance d’Henri Proglio à la loi NOME
EDF ne s'y est pas trompé : la loi NOME constituait un risque direct pour sa position dominante sur le marché de l'électricité français. C'est ainsi qu'Henri Proglio a dénoncé la loi NOME dès la fin octobre 2009, alors qu'il n'était pas encore entré en fonction à la présidence d'EDF. Henri Proglio s'est, en effet, exprimé devant les membres de la Commission des Affaires économiques de l'Assemblée Nationale et a annoncé qu'il résisterait autant que possible au "pillage" d'EDF éventuellement imposé par la loi NOME.
L’opposition des syndicats EDF à la loi NOME
La direction d'EDF pouvait conclure une alliance de circonstance avec des syndicats ouvriers particulièrement hostiles à la loi NOME. La CGT parlait, par exemple, de "déconstruction du système électrique français" et adopta une position particulièrement averse à la loi NOME. Le syndicat FO avait demandé au gouvernement de "renoncer au projet de loi NOME". La CFDT d'EDF s'est exprimée à l’époque en des termes encore plus directs: "arrêtez la casse d'EDF". Son administrateur publia une longue lettre dans laquelle il dénonçait la loi NOME, qui constituait un "cadeau empoisonné pour la concurrence sur le dos des consommateurs". Le lobbying syndical s’est révélé significatif. La mise en concurrence effective d'EDF grâce à la loi NOME était, en effet, susceptible de faire apparaître la lourdeur de structure du fournisseur d'électricité historique qu'est EDF, en comparaison de ses concurrents fournisseurs alternatifs, développés dans un esprit très "start-up" où tous les coûts doivent être maîtrisés, au plus juste.
EDF a fini par obtenir gain de cause sur les prix de l'électricité (ARENH)
Initialement, les concurrents d'EDF comme GDF Suez et Direct Energie réclamaient un prix de l'électricité ARENH (accès réglementé à l'énergie nucléaire historique) de 35€ par MWh, alors qu'EDF défendait un prix de 42€ par MWh. Le rapport Champsaur recommandait un prix d'environ 39€ par MWh, dessinant une piste de compromis. Finalement, la catastrophe nucléaire japonaise de Fukushima a achevé de convaincre le gouvernement qu'il était sage d'opter pour une fourchette haute (40€/MWh) afin de prévoir des investissements nécessaires à la sécurité du parc nucléaire français.
De plus, plusieurs éléments ont garanti que la position d’EDF ne puisse être trop affectée par cette loi : les tarifs réglementés ne peuvent être proposés que par EDF, de même que le tarif de première nécessité. De plus, le dispositif de l’ARENH est limité en taille à 100 TWh d’électricité.
La loi NOME : le bilan
Une ouverture de marché imparfaite (2011-2013)
La CRE fait état dès décembre 2011 d’un bilan relativement positif quant aux résultats de la loi NOME :
« Sur le segment des grands consommateurs d’électricité, particulièrement attentifs au prix de l’énergie, ce dispositif a eu un impact sensible. Ainsi, la part de marché des fournisseurs alternatifs sur ce segment est passée de 25,5 % à 29,6 % en volume entre fin mai et fin septembre 2011, soit une augmentation de 16 % (+ 7,2 TWh). En revanche l’impact de l’ARENH sur le marché des clients résidentiels et petits professionnels n’est pas significatif à ce stade, bien que le rythme d’ouverture de ce marché s’accroisse légèrement. »
Les fournisseurs alternatifs estiment toutefois globalement que le prix de l’ARENH est trop élevé et n’établit pas une égalité réelle entre eux et l’ancien monopole.
Jérôme le Page, consultant sur la régulation des marchés à la Fédération européenne du commerce de l’Energie explique : «Ce que j’ai pu observer sur le marché est que certaines entreprises ont pu faire quelques profits avec ce tarif, mais qu’il a essentiellement aidé des participants déjà présents sur le marché. Il n’a pas permis l’entrée de nouveaux entrants.»
Un marché de plus en plus ouvert à partir de 2013
La loi NOME a encadré le tarif de revente de l'électricité d'origine nucléaire historique d'EDF à ses concurrents, mais en fixant le tarif assez haut. La seule option pour améliorer la contestabilité du marché (capacité des nouveaux fournisseurs à réaliser des marges tout en proposant des offres compétitives) devient alors l’augmentation du tarif réglementé.
Or pour la première fois depuis la libéralisation de 2007, le gouvernement Ayrault a eu le courage de laisser passer une augmentation moyenne de 5% au 1ᵉʳ août 2013, un niveau toutefois toujours inférieur aux recommandations de la CRE. La hausse est justifiée par la progression des coûts du fournisseur historique EDF, que doivent légalement couvrir les tarifs réglementés. Cette hausse constitue une éclaircie pour les fournisseurs alternatifs qui sont désormais en mesure de proposer des offres compétitives pour les consommateurs résidentiels tout en réalisant de petites marges.
Perspectives de la loi NOME
L’entrée en vigueur de la loi NOME a conduit la Commission européenne à classer les poursuites qu’elle avait engagées contre la France pour entrave à la concurrence. La Commission européenne n’a donc pas imposé la disparition des tarifs réglementés pour les particuliers.
La Commission européenne sera vraisemblablement attentive dans les années à venir à ce que la fixation annuelle du nouveau prix de l’ARENH garantisse l’équité entre le fournisseur historique et les fournisseurs alternatifs. De plus, elle devrait veiller à ce que les tarifs réglementés jaunes et verts disparaissent bien à la fin décembre 2015 comme le prévoit la loi.